Contexte historique du film :
Les Temps Modernes (1936) est un film sorti pendant
la période de l’entre-deux-guerres. Au niveau économique,
les Etats-Unis puis l’Europe sont frappés par une crise
économique et sociale : le krach boursier d’octobre 1929 à
New York a entrainé une crise bancaire (faillite de banques),
puis une crise industrielle (fermeture d’usines), et enfin une
crise sociale (chômage, misère, faim). C’est la « Grande
Dépression ». La politique du New Deal (« Nouvelle Donne »)
lancée par Roosevelt à partir de 1933 a pour objectif de
relancer l’activité économique grâce à l’impulsion de l’Etat
(grands travaux…).
Présentation du film :
Les Temps Modernes est une comédie dramatique en noir et blanc. Le film a été
écrit, réalisé, mis en musique et produit par Charlie Chaplin chez United Artists. C’est un
film muet (le dernier du réalisateur), ce qui était anachronique pour l’époque car l’apparition
du cinéma parlant en 1927 avec Le Chanteur de Jazz a entrainé un déclin rapide et
irréversible du muet (et de la plupart de ses stars…). En réalité, ce film est « muet et
sonore » à la fois, puisque des voix, des bruitages et même le chant clownesque du héros ont
été intégrés au film et contribuent à sa dramaturgie. C’est aussi le dernier film de Chaplin
dans lequel intervient le personnage de Charlot, mondialement connu.
Tourné en 1934-35, le film sort en salles aux Etats-Unis le 5 février 1936 sous le
titre Modern Times. Il bénéficie d’une sortie mondiale dans les semaines qui suivent. Il
ressort en 1954 puis en 1972, en pleine guerre du Vietnam.
Grand succès populaire, le film a reçu un accueil mitigé de la critique. Ce film est
considéré aujourd’hui comme une des plus grandes réussites de Charlie Chaplin et un des
meilleurs films burlesques de l’histoire du cinéma.
Fiche technique:
Etats-Unis
Titre original : Modern Times
Producteur : Charles Chaplin
Production : United Artists
Réalisateur : Charles Chaplin
Scénariste : Charles Chaplin
Directeur de la photo : Ira H. Morgan
Acteurs :
L'ouvrier Charles Chaplin
La gamine Paulette Goddard
Le propriétaire du café Henry Bergman
Le mécanicien Chester Conklin
Le président d'Electro Steel Corporation
Al Ernest Garcia
Gloria DeHaven
Distributeur : MK2 Diffusion
Durée : 2h15
Sortie : 1936
Présentation du réalisateur :
Charles Chaplin est né en 1889 dans un faubourg pauvre de Londres. C’est un « enfant
de la balle » : son père est comique, sa mère chanteuse. Mais son enfance est douloureuse :
son père, alcoolique, décède d’une cirrhose du foie alors que Charles n’a que 12 ans. Sa mère
est régulièrement internée en hôpital psychiatrique. Charlie Chaplin débute sur scène à 5 ans
et fait plusieurs tournées en Angleterre en tant que pantomime.
Il est repéré aux Etats-Unis par la Keystone, firme spécialisée dans le burlesque
(slapstick). Il crée le personnage de Charlot en 1914, joue et tourne d’innombrables courts et
longs-métrages. Le succès est fulgurant. Il devient l’artiste le mieux payé au monde dès 1916
et signe plusieurs chefs d’œuvre : Le Kid (1921), La Ruée vers l’or (1925), Les Lumières de la
ville (1931),Le Dictateur(1940)... Pour la promotion des Lumières de la Ville, Charles Chaplin fait un tour du monde. Il
prend conscience des ravages de la crise économique. Elle devient sa source d’inspiration
principale pour Les Temps Modernes.
Synopsis du film:
Dans une gigantesque usine, de nombreux ouvriers se trouvent soumis au rythme lancinant du travail à la chaine. l'un d'eux, Charlot, perturbe de façon régulière le bon déroulement des opérations. Rendu fou par les cadences infernales et la répétition abrutissante imposées par le patronat, il sombre dans une crise de folie furieuse et se retrouve interné dans un hôpital puis en prison à la suite d'un quiproquo. Il finit par être relâché mais regrette le confort de sa cellule. Il fait alors la rencontre d'une jeune orpheline affamée "la gamine" qui subit elle aussi les difficultés de la vie de l'époque. Ils se lient et rêvent ensemble d'un avenir meilleur. Poursuivis par la malchance, tous deux connaissent des aventures rocambolesques et touchent du doigt plusieurs fois leur idéal de vie. Ils ne se laissent pas abattre et partent ensemble sur la route vers un futur incertain mais sans doute prometteur...
Lexique historique :
Fordisme ; organisation du travail recourant au travail à la chaine (La Ford T a été la première voiture
produite en grande série sur des chaînes de montage).
Maccarthysme : période (1950-54) de traque et de répression à l’encontre de militants et
sympathisants communistes (supposés ou réels) aux Etats-Unis. De nombreux artistes d’Hollywood
figuraient sur les listes noires, comme Charlie Chaplin ou Orson Welles et ont dû s’exiler pour
continuer à travailler.
Productivité : quantité produite divisée par la quantité de travail nécessaire pour la produire.
Stakhanovisme : en URSS, technique de propagande visant à accroître la productivité des travailleurs
(du nom du mineur Stakhanov qui aurait extrait 14 fois la quantité de charbon demandée et qui a été
élevé au rang de héros national)
Taylorisme : organisation du travail visant à augmenter la cadence de travail, donc la production et la
productivité.
Lexique d’analyse filmique :
Burlesque : genre cinématographique typique du cinéma muet (Charlie Chaplin, Buster Keaton, Marx
Brothers, Harold Lloyd, Laurel & Hardy…). Il repose sur un enchainement rapide de gags de type
slapstick, souvent absurdes et irrationnels. Les gags sont souvent autonomes et ne jouent pas
toujours un rôle indispensable dans la narration.
Cadre : partie de l’espace visuel enregistré sur la pellicule et apparaissant à l’écran.
Dramaturgie : étude de la composition d’un film, de la façon dont l’histoire est racontée.
Ellipse temporelle : omission (= passage sous silence) d’une période de temps, ce qui permet
d’accélérer le récit.
Fondu enchainé : surimpression d’une ouverture et d’une fermeture de plans (une image disparait
pendant que la suivante apparait).
Hors-champ : action se déroulant hors du champ de la caméra (action non visible à l’écran).
Intertitre (ou carton) : texte d’explication ou de dialogue inséré entre deux plans, en général dans le
cinéma muet.
Panoramique : mouvement de rotation de la caméra sur elle-même.
Pantomime : spectacle souvent accompagné de musique utilisant l’art du mime. Par extension, désigne
le mime lui-même.
Plan : morceau du film enregistré au cours d’une même prise.
Plan américain : cadrage d’un personnage à mi-cuisse.
Plan d’ensemble : cadrage couvrant la totalité du décor et les personnages qui s’y trouvent.
Plongée : prise de vue du haut vers le bas. Le point de vue du bas vers le haut est la contre-plongée.
Séquence : ensemble de plans ayant une unité de lieu ou d’action.
Slapstick (« coup de bâton ») : gag reposant sur un comique physique et violent (ex : chutes, bagarres,
chocs, poursuites…)
Surimpression : superposition de deux images.
Synopsis : résumé du scénario d’un film
Travelling : déplacement de la caméra.
Zoom : objectif donnant l’impression de se rapprocher de l’objet. (La caméra zoome en se rapprochant
et dézoome en s’éloignant)
Extensions possibles :
Quelques films qui font écho:
Sur la critique du monde du travail :
- CLAIR René, A nous la liberté (1931)
Sur la critique du monde moderne :
- TATI Jacques, Mon oncle (1957)
- TATI Jacques, Playtime (1970)
Sur la vision de la ville du futur :
- LANG Fritz, Metropolis (1927)
Sur le passage du muet au parlant :
- CROSLAND Alan, Le Chanteur de Jazz (1927)
- KEATON Buster, Le Caméraman (1928)
- DONEN Stanley, KELLY Gene, Chantons sous la pluie (1952)
- HAZANAVICIUS Michel, The Artist (2011)
Sur la Grande Dépression :
- FORD John, Les Raisins de la colère (1940)